

6 questions à Ho My An
K. Parlons un peu de vous : d’où vous vient votre vocation d’artiste ?
Je suis née à Paris, par hasard l’année du rat. Ce sont là mes racines vietnamiennes. Le hasard a voulu que je sois Parisienne mais j’ai grandi en Allemagne, à Tahiti puis dans le sud de la France. J’ai jeté l’ancre à Paris il y a 30 ans et j’y apprécie le coté cosmopolite et la générosité artistique.
J’ai toujours dessiné. J’ai vu les dessins de Jacques Boullaire, des portraits de Tahitiens au crayon qui m’ont donné l’envie d’étudier les arts plastiques pour acquérir le langage nécessaire à l’expression visuelle. Mais j’ai été très vite déçue par ces études et abandonné crayons et pinceaux pendant 20 ans pour un métier qui m’a fait voyager dans le monde entier. Nourrie d’images j’ai essayé de dessiner de nouveau mais j’avais perdu la main.
Une année de cours avec Marie Jo Tournon, une prof très rigoureuse, m’a remis le pied à l’étrier. Sans jamais vouloir me formater elle a répondu à ma demande de technique. Maintenant le partage de connaissances avec d’autres artistes a pris beaucoup d’importance pour moi. Je travaille en atelier partagé en peinture et en sculpture. Le modelage de la terre est nouveau pour moi et dans la continuité de mon travail de peintre. L’échange de savoir sans vouloir s’influencer mutuellement est une richesse inestimable.

K. Quelles sont vos inspirations artistiques ?
Jeune adolescente ma rencontre avec le peintre François Ravello, qui vivait sur l’ile de Moorea en Polynésie, a été importante. C’était un amoureux du peuple polynésien qui a su interpréter la vision que Paul Gauguin nous a transmise avec beaucoup de sensibilité et de douceur. Plus tard, j’ai été séduite par la violence d’Egon Schiele et le coté sombre de sa peinture. Beaucoup plus tard, Titouan Lamazou m’a convaincue que le « carnet de voyage » pouvait être à l’origine d’un travail plus élaboré dans la mesure où il aide à conserver en mémoire un instant éphémère et irremplaçable, celui de la rencontre de l’humain d’ailleurs.

K. Quel est votre processus de création ?

K. Pourquoi la Femme est-elle si présente dans votre œuvre ?
Sûrement parce que la femme silencieuse est celle qui s’exprime le plus dans sa démarche, son expression et sa gestuelle. Le contraire est vrai aussi car dans les sociétés qui ont développé l’égalité des sexes, j’ai l’impression que les corps deviennent muets dans le quotidien. Ceci dit, je pratique aussi le croquis de nus en atelier, ce sont mes gammes. J’ai aussi voulu mettre à l’honneur tous ces magnifiques modèles professionnels. C’est notamment la série des « Hammams ».

K. Vous évoquez les cinq sens dans votre démarche artistique, pour quelle raison ?
Prendre le temps de la sensation de l’espace, des lumières, des gens, des sons, de la respiration et de la sensualité des lieux. Il faudrait peut-être évoquer un sixième sens, celui de l’émotion. Daniel Pennac, dans son roman L’œil du loup, racontait dans ce livre pour enfants la rencontre d’un enfant congolais en exil et d’un loup borgne au zoo. L’enfant permit au loup de lire dans ses yeux le chagrin de sa solitude en Europe et à son tour, le loup à travers son œil unique, lui ouvrit le désastre de ses souvenirs. Pour moi c’est ce genre de rencontres qui se prêtent à une histoire, un début d’histoire à partager. Peu importe qu’elle soit imaginée, fantasmée, elle est contenue dans un regard, une fraction de seconde parfois.

K. La majorité de vos peintures sont des aquarelles, pourquoi ?
J’aime sa fluidité. J’aime l’eau, celle des mers, des rivières et l’humidité des tropiques. L’eau est maniable et transparente. Quoi de plus proche de l’être vivant puisque nous sommes surtout faits d’eau. Aussi, je travaille l’aquarelle sur toile ou bois car ce procédé ne nécessite pas d’encadrement. Ainsi le sujet peut déborder du support et s’en évader.

L’avis de KAZoART
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