Les œuvres graphiques d'Emmanuelle Mason sont des corps, où se jouent des drames, insignifiants ou terribles.
" Le regard que je porte sur le monde est à la fois fasciné, douloureux et insurgé. Je pointe, du bout de ma plume, l’indicible, et je crois rejouer cette question du sublime : ce qui est beau et effrayant tout à la fois.
Pour la série des natures mortes, mon travail relèverait de l’émotion décrite par Baudelaire dans son poème "La Charogne". Ces restes en putréfaction, trouvés sur le bord de la route ou à l'école vétérinaire, participent de l’immonde, du répugnant, de la maladie. A travers la figure de l'animal, je parle de nous, de notre mortalité. Pourtant, si le sujet est « immonde », la facture, elle, relève de l’orfèvrerie, du délicat.
Pour la série des désastres, j’ai travaillé principalement en regardant des images de presse de la Syrie dévastée. Je tente de dire la ruine de notre monde, d’une civilisation, à travers la ruine de l’image. La ruine de l’homme à travers la ruine de son habitat. Je me force à être le témoin actif d’un drame qui se joue si proche, auquel j’assiste, comme tous, impuissante, les bras ballants, l’âme à vif. Aussi, j’avance à pas prudents pour construire une œuvre qui soit engagée, mais aussi pudique, silencieuse, respectueuse.
Une partie des ventes de ces travaux est systématiquement utilisée pour aider les réfugiés Syriens de Toulouse avec qui je suis en contact depuis septembre 2015."