La peintre Delphine Collot Millas alias CoLLot D2L nous interpelle, est-elle comme ces cellules qui se développent dans la chrysalide permettant sa transformation en papillon ? Avec son « bagage génétique » – elle vient d’un milieu artistique – elle était prédisposée à s’intéresser à l’art, à défaut d’être programmée, mais sa mutation artistique qui maturait depuis l’enfance a été accélérée par ce type d’événements dont on peut se dire qu’ils ne doivent pas forcément tout au hasard. Alors, dans sa matrice d’artiste, un beau jour, sont arrivés des bataillons de haricots.
En ordre ou dispersés, monochromes ou bardés de couleurs et de signes mystérieux, ils peuvent voyager à travers un corps familier ou étranger, formant un corpus génétiquement différent à chaque nouvelle toile, comme si deux gènes différents, celui du concept et celui de l’émotion finissaient pas s’accoupler. Et ses haricots de s’éloigner de leur famille (Support-Surface), pour vivre leur vie de mutant avec une belle imprudence. Ils se promènent dans des contrées où on ne les attend pas, cernant son petit gène d’artiste de propositions aléatoires.
Chez Viallat, la famille artistique à laquelle on peut la rattacher, le sujet c’est la non-forme et la déconstruction tandis que chez Delphine Collot-Millas le sujet, c’est, au contraire, la forme en mutation, une force de construction et un élan de vie. Si la répétition intervient, c’est pour la faire avancer sur une problématique d’ordre plastique et ses haricots, « formes en mutation » deviennent progressivement humains trop humains, le parangon des tâtonnements de la recherche médicale, de ses avancées, qui la passionnent. De ses accidents aussi. Le gène parfait n’existe pas, le parcours univoque de l’artiste non plus. Elle préfère l’équivoque qui lui permet de lever le voile avec légèreté sur des problématiques touchant au champ médical et sociétal : comment sont traités ceux qui sont différents dans une société normative ?
Les femmes qui ne peuvent pas avoir d’enfants, les handicapés, les personnes atteintes de maladies rares… sont la partie infime d’un iceberg engendré par un environnement en proie à des violences invisibles génératrices de dysfonctionnements graves alors que la société se focalise sur ce qui est visible.