Une peinture du singulier-pluriel
«Je est un autre...» disait Rimbaud.
«Jeu, c'est les autres...» aurait pu répondre Queneau.
«L'enfer, c'est les autres...» disait Sartre.
«L'envers, c'est les uns...» aurait pu répondre Pérec.
Celui qui peint des “bonhommes”
Gaëtan de Séguin est né en 1971 à Montpellier. Formé à l'ESAG Penninghen, il effectue différents métiers liés de près ou de loin au dessin avant de se consacrer pleinement à la peinture.
"Depuis toujours j’ai souhaité deux choses : vivre dans un endroit bien précis et « vivre » de ma peinture.
J'ai atteint mon premier but en 2010, une maison/atelier que j’ai dessinée et bâtie sur 10 ans. Une architecture tendue, de la lumière et une vue immense sur une région qui fait partie intégrante de ma vie.
Depuis 40 ans, je suis celui qui peint des « bonhommes ». Je suis responsable d’un sacré bestiaire ! Ma peinture est clairement figurative. Mais chacun est libre d’inventer l’histoire de mes personnages."
Le mot de l'artiste
"Soudain j’avais envie de voir mes « bonhommes » se rassembler et déborder de la toile. Des foules denses ou clairsemées, gaies, dignes, silencieuses ou rugissantes, poignantes.
Des individus au physique unique, la somme de leur conviction teintant le groupe. C’est cela que je cherche à travers ma série « J+... ». Je recouvre ma toile d’une couleur dominante très dense, presque criarde. Puis cette sous-couche est entièrement recouverte.
La tonalité redevient claire et les teintes se fondent dans un camaïeu de gris colorés. A partir de là, je commence à peindre en ajoutant ou soustrayant de la matière. La musique que j’écoute alors va rythmer l’apparition du groupe. En grattant avec les outils les plus divers je peins tout autant qu’avec brosses et pinceaux."
Des êtres qui deviennent motifs
"Gaëtan de Séguin peint la foule. Cette foule constituée d’une multitude de silhouettes presque identiques mais toutes singulières. Des êtres qui, par l’action de la peinture même, deviennent motifs.
Étrange et non communicante, cette silhouette échappe parfois à la foule mais sans y trouver son salut. Seule, à croiser son semblable sans arriver vraiment à le comprendre... Quand on connaît Gaëtan cela étonne, lui qui aime tant les mots et la conversation. Sa peinture serait-elle son double en négatif ?
La multitude et l’unique, l’anonymat et le personnel, le silence et le bruit. Il y a tout cela dans la peinture de Gaëtan, une peinture du singulier-pluriel." - François Supiot