En 2009, Véronique Chanel, artiste peintre et photographe, tombe amoureuse de la Laque, technique chinoise ancestrale que l'on connaît surtout dans l'ameublement. Elle va se former à la Laque et ne plus s'arrêter, cherchant sans cesse à s'approprier cette technique rigoureuse, classée dans les « métiers d'art » pour l'utiliser dans un univers plus personnel. La laque possède une douceur inimitable qui lui confère une sensualité présente aussi dans le long processus impliquant une chaîne opératoire rigoureuse.
Elle parle de «jubilation retenue » qui participe à sa passion pour ce médium, dans le fait même qu'il lui impose cet état changeant, être dans une espèce de méditation alors qu'elle ponce la surface durant des heures, et dans la joie plus spontanée et tendue de l'action créatrice.
Véronique Chanel parle des possibilités infinies offertes par cette technique ancestrale, s'affrontant à la matière dans un esprit plus contemporain, ce qui consiste à enrichir et trouver ses propres solutions créatives, s'étant laissée surprendre, réutilisant ses surprises, les adoptant.
L'artiste travaille sur plusieurs séries, un ensemble de silhouettes « Présence », qu'elle dit avoir surgi de la matière, comme présentes dans les couches successives de matière et de vernis, une série de portraits de personnages au regard énigmatique et une série « robes de rêve » à propos desquelles elle écrit ceci :
« J'utilise la technique de la laque pour peindre des robes, inlassablement des robes, ainsi figées dans la transparence des strates de vernis qui leur sert d’écrin. Pour dire le souvenir d’un instant volé au mouvement, à la vie. Immobilisées dans leur envol , fixées dans leur fragilité, théâtralement présentes, des danseuses sans danseuses, des fantômes de joie, d’où coulent ça et là une fleur à la ceinture : comme le concentré d'une énergie, sa trace prégnante. Et les éclaboussures viennent dire alors ceci : souviens toi comme nous avons tourné et ri, comme nous avons vécu et si je ne danse plus, la vie est là toujours.
Comme une tentative d’épuisement du motif, tentative vaine et jubilatoire, que je poursuis - une obsession -, étourdie par la curiosité et le plaisir de les voir apparaître, toujours différentes et devenant prétexte au seul plaisir de peindre, de chercher l’émotion par les couleurs et la matière dialoguant dans la transparence de la laque. »