Geneviève Michon est ethnobotaniste et photographe.
Sa vie professionnelle et son intérêt artistique tournent autour de l’Arbre, et en particulier de l’ « Arbre Paysan », celui qui accompagne les cultures rurales du monde depuis l’aube des temps, celui qui a forgé sa personnalité au contact de l’Homme. Proposition que l’on peut inverser (et si c’était la personnalité des Hommes qui s’affinait peu à peu au contact des Arbres ?) et qui donne au travail une autre dimension : à travers ses images, n’est-ce pas aussi, et surtout, des cultures mêlées entre Homme et Arbre dont l’artiste veut rendre compte ? N’est-ce pas, finalement, d’un certain type de rapport à la Nature et à d’autres formes du Vivant dont il est question ?
Il s’agit donc de présenter des Arbres constitués à la fois de leur histoire propre, et des complicités tissées avec plusieurs dizaines de générations d’Hommes. Des Arbres travaillés par les Hommes, comme des reflets des Hommes traversés par ces Arbres.
Faire l'expérience de l’Arbre dans la diversité de ses formes et des histoires qui le constituent crée peu à peu un parcours initiatique autant qu’une forme de contemplation de ce qui nous reste éternellement inaccessible : une forme de vie totalement étrangère à la nôtre, mais qui y est cependant étroitement mêlée, nous enveloppe et nous permet de vivre. Des formes végétales dans lesquelles s'écrit notre propre histoire.
Pour rester au plus près de ce que ces arbres lui transmettent, Geneviève Michon superpose les clichés pris sur le vif, jouant entre transparence et opacité, y mêlant souvent des « coups de pinceaux » et des dessins empruntés à son compère Philippe Deltour, artiste plasticien, avec qui elle travaille depuis maintenant plus de trois ans.
Ces images, souvent longuement retravaillées, constituent peu à peu une "forêt par accumulation", dans laquelle le travail de l’artiste finit par tisser aux troncs et aux branches toutes les histoires humaines aujourd’hui effacées qui les ont traversés, et, souvent, marqués. Une forêt qui n'est pas réplication du Même, mais déploiement de singularités totales, de danses lentes, immobiles, construites patiemment au cours des siècles.
Et derrière cette forêt d'Arbres, mais sans aucun anthropomorphisme pictural, une forêt de silhouettes humaines, de visages et de gestes, encore présents autour de ces Arbres : une humanité inscrite en filigrane.