Julie Balsaux fait partie des gens qui ne tiennent debout que parce qu’ils avancent, qu’ils agissent et qu’ils inventent sans cesse, et d’abord leur vie, tous les jours, comme s’ils étaient placés sous la menace immédiate d’une désespérance sans fond. Parce qu’il leur faut lancer un avion de papier contre l’absurdité du monde, et que le monde est lourd, il s’agit chaque fois de s’arracher au sol, de faire surgir l’élan d’un saut dont on voudrait qu’il puisse durer infiniment. Aussi se trouve-t-on quelque part entre l’énergie du geste et la lente mouvance des nuages. Dessin, installation, écriture, propositions sonores, chaque pièce est une tentative de parler du monde tout en lui échappant. Chaque idée ouvre sur un pari, l’affrontement avec la fabrication, le plaisir d’une mise en oeuvre technique et artisanale, et l’envie que cette manipulation disparaisse dans une jubilation joyeuse et pourtant dérisoire. / Jean Cristofol 2012.
Note sur les séries et pièces présentées.
La série "Time-Line" dont sont issues les formats A3 présentés, est une série réalisée depuis 2012. Issus d'une pratique protéïforme interrogeant le monde numérique et son passage du virtuel au palpable, la pratique du dessin de Julie Balsaux propose une reprise chirurgicale de photographies de presse et visuels recherché sur le net à différentes périodes. (2009. 2012.2013.2014) La série Time-line est une série de dessins issus des médias internationaux. Depuis 2012 l'artiste parcourt les journaux numériques et choisit une image par mois. Cette image est ensuite accompagnée d'un texte relatant ou non l'image. Le titrage se place alors en dissonance entre l'impact de l'image et le texte. Cette série se positionne comme un marqueur de temps, un espace témoin du monde à travers les médias et réseaux numériques. Entre engagement politique, satire de sa propre temporalité l'artiste positionne la pratique du dessin en tant que résidus de ce qu'il reste du flux d'images qui enveloppent nos contemporanéités. De ce flux ressortent une multitude d'uniques.
La série ennuis, petits formats contrecollés sur bois sont les débuts de cette pratique de l'image. Pratique d'école débutée en 2009, le questionnement du statut de classe sociale se dessine dans cette imagerie adolescente. L'artiste étudie alors à l'Ecole Supérieure d'Art d'Aix-en-Provence où elle apprend des compétences liées à l'électronique, au son, à la mécatronique et aux hypermédias. En parallèle elle développe sa pratique du dessin et la relie aux espaces d'internet et aux images "buzz". Dans des questionnements sur l'image, dont sa génération est saturée, elle propose de composer un "mur d'images" au même statut qu'un adolescent le ferait en recouvrant les murs de sa chambre. Ces "ennuis" sont l'aboutissement d'une collecte d'images dont le dessin change le statut au même titre que le faisait Elaine Sturtevant en réinterprétant les œuvres de ses contemporains.
La série "les grosses dames" dont toutes les pièces ne sont pas présentées ici proposent la même démarche sur des images issues de la pornographie. Le discours du dessin emporte dans une esthétique poétique et ramène les corps à leur fragilité, à une sensualité grave et dérangeante. Ces images cachées du net se trouvent exposées en galerie aux regards troublés de ses visiteurs.