Nathalie Si Pié : Délicatesse d'un monde pixelisé

Bonjour Nathalie. Merci de nous accorder cette interview ! Faisons un bref retour sur vos débuts. Comment votre carrière artistique a-t-elle débuté ? Peut-on parler d'une vocation ?

J'ai toujours peint, dessiné, depuis mon enfance. Avant d'entrer aux Beaux-Arts, je recherchais déjà différentes techniques picturales en m'inspirant d’œuvres marquantes pour moi. J'ai toujours été en recherche et dans divers processus. En ce sens on peut parler d'une vocation.

Vous ressortez diplômée de l'école des Beaux-Arts d'Angoulême. Que se passe-t-il ensuite ? Comment parvenez-vous à définir votre style pictural ?

Après avoir obtenu mon diplôme des Beaux-Arts je me suis orientée vers une peinture très épurée. Au fil d'intenses recherches cette épure s'est construite par une abstraction géométrique. C'est dans cette période que j'ai placé le carré au centre de mes œuvres en créant des combinaisons multiples liées à l'aléatoire.

Je situerais mon retour à la figuration liée à "l'abstraction" de carrés par la découverte du peintre Gerhard Richter. Il s'autorisait à ouvrir tous les possibles en visitant plusieurs champs de l'art. Cette découverte a été un tournant dans mon travail pictural. J'ai alors créé au fil des années mon style singulier en associant la figuration et l'abstraction des carrés devenus pixels.

La notion de pixel caractérise manifestement votre Œuvre. Quelle est la technique derrière cette démarche originale ?

Dans mes toiles géométriques évoquées ci-dessus je peignais chaque petit aplat au pinceau plat afin qu'il n'y ait pas d'aspérité. Mes œuvres actuelles sont différentes à tous points de vue. Les pixels sont très souvent le reflet en miroir d'un paysage peint de façon figurative.

Désormais cherche à créer une vibration dans les pixels. Pour cela j'ai inventé une technique très personnelle qui m'a permis d'obtenir la vibration recherchée.

J'utilise des blocs de polystyrène le plus dense possible dans lesquels je découpe au cutter des cubes dont les tailles varies de 5 à 20mm en fonction de la taille des œuvres. Je peins les pixels par touches successives en tamponnant sur la toile le cube de polystyrène enduit de peinture à la couleur voulue.

C'est un travail de longue haleine mais qui apporte une originalité singulière à mes œuvres.

La peinture à l'huile et l'acrylique paraissent n'avoir aucun secret pour vous. Maîtriser différentes techniques vous permet-il d'accéder à plus de liberté ?

J'aime passer d'une technique à l'autre pour des raisons totalement différentes. Je peins la partie figurative de mes toiles à la peinture à l'huile car elle apporte de la fluidité et permet un temps de réflexion de part le temps de séchage plus long, ce que ne permet pas l'acrylique.

Inversement l'acrylique séchant plus vite sur mon "outil/cube" en polystyrène, cela me permet rapidement de passer d'une nuance colorée à l'autre. Par là-même la maîtrise de ces techniques m'apporte une liberté plus grande pour aborder des sujets très variés.

Les pixels sont très souvent le reflet en miroir d'un paysage peint de façon figurative.

J'ai inventé une technique très personnelle qui m'a permis d'obtenir la vibration recherchée.

Certaines de vos toiles sont bien plus figuratives et ne comportent pas ou peu d'éléments pixelisés. "Bord de mer en soirée", "Soir d'été" ou encore "La maison bleue sur l'île". Ont-elles une signification différente ?

Il m'arrive en effet d'avoir ponctuellement des "apartés" sans éléments pixelisés. Il n'y a pas de raison précise à cela. C'est peut-être une question d'humeur du moment. De la même façon je peins des thèmes très différents selon les saisons ou ce que je ressens. J'ouvre toujours les possibles !