La naissance du monochrome
Aujourd’hui, les historiens de l’art considèrent que le statut de « premier monochrome de l’histoire » revient à l’œuvre « Carré blanc sur fond blanc » réalisée en 1918 par Kasimir Malevitch.
Pourtant, cette position est remise en question par la redécouverte en 2018 de peintures monochromes réalisées par le mouvement caricatural des « Incohérents » trente ans avant l’œuvre de Malevitch ! Ce groupe d’artistes cherchait à ridiculiser l’art bourgeois ainsi que les pratiques des impressionnistes qui réduisaient de plus en plus leur palette dans leurs œuvres.
C’est le poète Paul Bihauld, en 1882, qui réalise ce qui semble alors être le réel premier monochrome de l’histoire de l’art, avec son œuvre totalement noire intitulée « Combat de nègres pendant la nuit ».
Séduit par la démarche de Bilhaud, l’artiste Alphonse Allais réalise à la fin des années 1880 une série de sept peintures monochromes. Nous pouvons notamment citer l’œuvre totalement blanche, intitulée « Première communion de jeunes filles chlorotiques par un temps de neige ».
La peinture monochrome s’est essoufflée à la veille de la Seconde Guerre mondiale, avant de réapparaître dans les années 1950 avec la domination de l’art abstrait.
C’est avec les peintures abstraites monochromes d’Yves Klein, vers 1955, que le terme de « monochrome », qui qualifiait jusqu’alors un camaïeu, devient un genre à part entière, au même titre que le paysage ou la peinture d’histoire.
L’exploration de l’immatériel
L’art abstrait monochrome est un moyen pour l’artiste d’exprimer le pouvoir de la peinture et de s’affranchir des limites imposées par l’art traditionnel.
Par exemple, l’objectif artistique de Malevitch était de libérer la peinture du monde des objets et ainsi, de la figuration. Pour Mark Rothko, la peinture monochrome permet une expérience intérieure.
D’autres artistes ont la volonté de construire au travers d’une peinture monochrome un chemin vers l’infini, d’atteindre l’immatériel et la pureté qui s’en dégage. Certains considèrent la couleur comme un vecteur d’émotions intérieures et spirituelles.
En tant que spectateur, nous pouvons simplement nous laisser envoûter par cet art abstrait monochrome et nous laisser enivrer par nos émotions engendrées par la vision d’une telle œuvre. Mais afin de comprendre ce qui se cache derrière une peinture monochrome, et aller au-delà de nos sensations intimes, il est important de questionner les intentions de l’artiste. Car derrière chaque monochrome se trouve une intention, qu’elle soit artistique, humaine, sociale, spirituelle, créative ou encore formelle !
